Le Père Louis Gagnon o.ss.t, ministre provincial des Trinitaires, m’a demandé de recueillir les témoignages de personnes qui auraient connu et vécu une expérience de foi à travers le ministère du Père Jean-Paul Regimbal o.ss.t.
Je commence par le mien. Je prendrai quelques lignes pour me présenter pour faciliter votre compréhension de l’impact que ce trinitaire a eu dans ma vie. Je suis né en 1957 et je n’ai pas connu mes parents. Ce que je sais, je le tiens de ma grand-mère. N’ayant pas la santé de prendre en charge trois enfants dont un bébé naissant, elle nous a placé sous la protection de la cour de Montréal. J’avais un peu plus de 13 ans lorsqu’elle est venue nous voir dans le dernier foyer, mon frère Réal, ma jeune sœur Lucie et moi. Elle nous partageait certains passages de notre jeune enfance et nous expliqua ce qu’elle a été obligée de faire pour nous mettre en sécurité. Elle expliqua aussi que, dû à la maltraitance, nous avions déménagé à plusieurs reprises. Elle était très triste en nous parlant de cette période de notre vie. Elle mentionnait aussi que nous étions à notre 11ième foyer d’accueil. Personnellement, je ne me souviens que des deux derniers. Dans l’ensemble de ces foyers, nous aurions subit beaucoup de violence, d’abus moral, sexuel et de maltraitances de toutes sortes. En fait notre vie était très loin du paradis. Ça ressemblait beaucoup plus à l’enfer. D’ailleurs mon frère, très révolté, a fini par se suicider à sa sortie de prison à l’âge de 19 ans. Ma jeune sœur a voulu faire la même chose, mais elle n’a pas réussi parce que je suis arrivé au bon moment.
En 1977 ma copine qui avait assez de foi pour convertir une ville entière, me demanda de l’accompagner à un congrès diocésain. Le Père Jean-Paul Regimbal était le prédicateur de cet événement. À la clôture de ce congrès, lors de la procession, je fus témoin de la guérison physique d’une jeune fille que je reconnaissais. Elle vivait dans le village voisin et elle était atteinte de paralysie cérébrale. Pendant cette procession, l’évêque du diocèse a pris la jeune fille, l’a élevée dans les airs en geste d’offrande. En la déposant au sol, la jeune fille fit quelques pas. Elle fut prise en charge par les responsables du congrès, elle disparut rapidement en arrière scène. Cet événement m’a bouleversé pendant plusieurs jours. (J’ai eu des nouvelles de cette jeune fille sept ans plus tard me confirmant ce que j’avais vu. Suite à sa guérison, elle est mère de deux enfants et elle va bien).
Je me suis informé auprès d’une libraire s’il existait un livre au sujet de miracle. Elle m’a sorti la bible de Jérusalem. À travers la lecture de la Bible, dans l’Évangile de Saint Matthieu au chapitre 9 verset 1-8, je découvris que Jésus avait guéri un paralytique. Je ne suis pas fou, ça existe les miracles ! Cette lecture de la parole me révélait en quelque sorte que Dieu existe. Je me suis mis à sa découverte. Sur l’invitation de d’autres jeunes, j’ai commencé à cheminer. Tous les vendredis soir, au sous-sol de l’église, il y avait le partage de la parole de Dieu, les chants, la prière et surtout les temps d’adoration qui m’aidaient à découvrir l’amour de Dieu. Il y avait régulièrement des journées de ressourcement pour les jeunes dans un collège de Drummonville et le Père Jean-Paul Regimbal venait y donner des conférences. J’ai vécu aussi mes premières retraites de jeunes chez les Pères Trinitaire avec, bien sûr, le Père Jean-Paul Regimbal et l’équipe d’animation de Témoignage Jeunesse. La prédication, l’animation et les partages ont été extraordinaire ! À la dernière retraite, la plupart des jeunes sont repartis en fredonnant le chant « Jésus je t’aime », une composition d’un jeune du Centre Paul VI, Tony Gravel.
Quand les soirées de prière ont repris, en septembre, il n’y avait que quelques jeunes et, parmi eux, j’étais le seul musicien. La religieuse commençait toujours l’ouverture de la saison par l’adoration. Elle m’a demandé de chanter le nouveau chant « Jésus je t’aime ». Je n’ai chanté que la première ligne du refrain. Je n’ai pas été capable d’aller plus loin. En chantant « Jésus je t’aime » je l’ai entendu dans mon cœur me dire « je t’aime ». Je suis tombé à genou et j’ai pleuré plus d’une heure sans trop comprendre ce qui m’arrivait. En me relevant, j’ai eu conscience que Dieu m’appelait. Il fallait que d’autres entendent un « je t’aime » comme ça !
L’année 1979 fut assez émouvante; la mort tragique de mon frère suivie de plusieurs événements qui m’ont amené à vouloir en finir avec la vie. C’est cet été là que se tenait aussi le deuxième congrès Charismatique à Montréal. Le samedi, il y avait un atelier pour les jeunes, au centre Paul Desmarteaux, avec l’abbé Christian Beaulieu ispx. Les retrouvailles avec quelques jeunes avec qui j’avais vécu des retraites auront réussi à me faire oublier mes idées de mort. Ce sont ces mêmes amis qui m’ont présenté Lucie.
Suite à l’incendie de mon lieu de travail à Nicolet, je me retrouve à Granby pour me rapprocher de Lucie qui faisait un stage au centre Paul VI. Je me suis trouvé un nouveau travail, un hébergement et un endroit, le Café d’Accueil Chrétien, pour me ressourcer avec d’autres jeunes. Le vendredi, le Père Jean-Paul Regimbal venait nous enseigner. Après avoir passé la semaine à former les jeunes au Centre Paul VI, il venait nous donner les éléments clefs de ses enseignements et nous envoyait les mettre en application. « De la parole aux actes » disait-il ! Il nous invitait à mettre en pratique, sur le champ, ce qu’il venait de nous enseigner. Nous avons ainsi fait l’expérience de la spiritualité de Témoignage Jeunesse. (Spiritualité qui nous a donné et nous donne encore le désir de suivre le Christ).
Tout au long de cette année là, à son insu, les enseignements qu’il donnait ont été, pour moi, source de guérison. Je ne pouvais pas le consulter quotidiennement, mais chacune de ces conférences a contribué à me reconstruire, à redonner sens à ma vie et à faire de moi ce que je suis aujourd’hui; à comprendre et à répondre fidèlement à l’appel que j’avais reçu. J’ai appris à faire confiance à l’Esprit Saint et devenir un disciple à l’écoute, à rester debout dans l’épreuve et surtout l’importance de prendre le temps de s’asseoir aux pieds du maître. Il nous ramenait toujours devant la nécessité de faire un choix pour le Christ et de vivre le radicalisme de l’Évangile. « Que ton oui soit oui, que ton non soit non ». Il nous faisait bien rire quand il nous invitait à ne pas être entre le oui et le non, à ne pas être des nouilles!
Cette année-là, Il est même arrivé à quelques reprises, de travailler avec lui comme animateur en remplacement des jeunes de Témoignage Jeunesse. C’est là que j’ai découvert la libération des captifs, la spiritualité des Trinitaires. Au fond de moi, j’avais à cœur, comme laïc, la mission des trinitaires et cela, sans devenir religieux, mais plutôt en bâtissant une famille.
C’est en septembre 1980 que Lucie et moi sommes mariés. C’est en combinant nos forces et nos différences que nous avons aussi été appelés à témoigner, à animer et bien sûr à évangéliser partout où le Seigneur le permettait. Le Seigneur nous a bénis par la naissance de quatre enfants: en janvier 1982 est née Hélène, Daniel en mai 1983, Myriam en mars 1985 et Annie en août 1987. Chacun d’eux a été baptisé par un trinitaire, cela allait de soit. Au fil des années nous avons animé de nombreuses retraites, des journées de ressourcement, des temps d’adoration et sans oublier les soirées de prière au « Mont-Plaisant » appeler aujourd’hui « Maison de spiritualité des Trinitaires ». Au fur et à mesure que les enfants grandissaient, ils s’impliquaient. Ils ont contribué à l’élaboration et la conception des albums et, comble du bonheur, ils ont participé à nos animations sur la route. La spiritualité que nous a transmise le Père Jean-Paul, a porté ses fruits tout au long de ces années.
Ma dernière rencontre avec lui a eu lieu la dernière semaine d’août 1988, peu avant son entrée à l’hôpital et son décès. Il est venu à ma rencontre au Centre Paul VI. Là, seul, j’attendais une quarantaine de retraitants que nous hébergions pour la semaine parce qu’il manquait de place chez les trinitaires. Je le sentais fatigué, presque tourmenté. C’est devant un café, autour de la grande table ronde de la cuisine, qu’il m’a ouvert son cœur. Je ne l’avais jamais vu dans un tel état. C’est la première fois que le Père me partageait son état d’âme.
Il me dit : « ne faite pas la même erreur que moi ». J’ai répliqué aussitôt, en lui disant : si vous avez fait des erreurs avec l’instruction que vous avez, quelle sorte d’erreur pensez-vous que je vais faire alors que je n’ai même pas terminé mon secondaire ? « Non, non, tu n’as pas compris, ne perdez pas votre temps à dénoncer, annoncez l’Évangile » !
Cette dernière rencontre privilégiée avec le Père Jean-Paul Regimbal est restée gravée dans ma mémoire comme son héritage ultime pour nous personnellement. Il venait ainsi nous donner le chemin à suivre jusqu’à la fin. Oui, cet échange, qui a duré à peine le temps d’un grand café, a été très bénéfique pour moi personnellement et pour notre couple. Nous nous sommes appliqués à suivre cette directive sachant qu’elle est pleine de sagesse. Elle nous a épargné de nombreux écueils, a dynamisé et orienté notre ministère d’animation et elle nous guide encore aujourd’hui.
Vous êtes en mesure de comprendre mon enthousiasme quand il est question du Père Jean-Paul et pourquoi je suis impliqué dans la fondation. Je souhaite faire connaître ces enseignements au plus grand nombre de personnes possible pour que leurs bienfaits se multiplient pour la gloire de Dieu. N’hésitons pas à demander son intercession, car il est encore plus en mesure de nous aider maintenant !
Je sais que le Père Jean-Paul Regimbal a rejoint de nombreuses personnes à travers son ministère dans le monde et j’espère recevoir d’autres témoignages dans le but d’obtenir son intronisation en collaboration avec les Pères Trinitaires.