Amour
Trinité Sainte
Esprit de feu et de vérité

André BisaillonMa première rencontre avec le père Jean-Paul Regimbal a eu lieu autour des années 1975-76, par l’entremise d’un amie, Mme Germaine Cromp, professeure au Département de philosophie de l’université de Montréal et auteure de nombreux articles dans des revues telles: Revue canadienne de philosophie, le Laval Théologique et Philosophique, Science et Esprit, etc.
  Elle m’avait alors demandé de la conduire à Granby pour assister à une soirée de prière animée par le père Regimbal. J’avais alors mis en veilleuse toute pratique religieuse, je ne connaissais pas le père Regimbal et encore moins le mouvement charismatique dont il fut l’initiateur au Québec. «Vous serez ami avec le père Regimbal» m’avait-elle prédit. Ce dont je n’avais nulle envie.
  Après une soirée de prière qu’il animait et qui m’avait choqué tant la foule était nombreuse et exaltée, madame Cromp s’était placée dans la file d’attente des personnes désireuses de le rencontrer. Lorsque vint son tour, elle m’a poussé dans la pièce et s’est retirée. L’entretien fut bref. Je n’avais rien à demander. Sans me connaître, il m’a dit alors : «Vous êtes un poète. Lisez les psaumes.» Fin de l’entrevue.
  Un an plus tard, alors que j’assistais à une soirée de bienfaisance à la Maison du Père, un centre d’accueil pour les itinérants, je vois entrer un prêtre que je reconnaissais vaguement. J’entends alors des murmures dans la foule : «C’est le père Regimbal !»  Il vient s’asseoir dans la rangée devant moi.
Au milieu d’un discours, je me lève pour céder ma place à une dame âgée. Ce faisant, j’accroche par inadvertance le père Regimbal. La soirée étant particulièrement chaude, je sors respirer un peu d’air frais. Quelques minutes plus tard, il vient me rejoindre. On se présente. L’homme est grand, imposant et digne.
  Après m’avoir demandé ce que je faisais dans la vie, j’étais alors annonceur à la radio et à la télévision et professeur au conservatoire il me dit : «J’ai fondé une école d’évangélisation pour les jeunes (Le Centre Paul VI) et j’ai besoin d’un professeur pour leur apprendre à s’exprimer en public. Vous êtes cet homme je n’ai pas les moyens de vous rétribuer.»
  D’abord insulté par son audace, puis amusé par cette même audace, j’ai demandé à réfléchir. Par un concours de circonstances, que certains appellent Providence, je me suis retrouvé, l’été suivant, à Granby, dans un bâtiment en voie de construction à enseigner à des jeunes gens qui, le soir encore, couchaient par terre à la ferme de monsieur et madame Ostiguy, qui avaient offert le terrain sur lequel est érigé le Centre Paul VI.
  J’avais alors peu de contacts avec le Père Regimbal, entièrement absorbé par ses prédications et ses retraites, tant au Canada qu’à l’étranger, et par ses nombreuses fondations. Par contre j’avais créé des liens, professionnels d’abord, puis cordiaux par la suite, avec sa secrétaire, Thérèse Corriveaux et son assistante sœur Graziella Désilets, au Carrefour de la prière, également fondé par le père Regimbal. C’était une ruche bourdonnante d’activités. Il y avait ses bureaux.
  C’est là que j’ai fait la connaissance de sa sœur, Lucille Regimbal, bienfaitrice des œuvres de son frère Trinitaire, qui allait devenir pour moi, jusqu’à son décès, une amie précieuse et une grande sœur.
  Peu à peu, j’ai appris à connaître et à apprécier le père Jean-Paul Regimbal. L’homme était un travailleur infatigable, simple, entier, généreux, chaleureux, accueillant, cultivé, sensible, artiste, musicien et visionnaire. Le prêtre était un prédicateur de feu, entièrement voué à son ministère et porté par une foi capable d’embraser les foules et de soulever des montagnes. Plus que quiconque, il a contribué à faire connaître et à propager la spiritualité Trinitaire, la libération des captifs, et à initier un renouveau charismatique qui allait donner un souffle nouveau à l’Église et ramener en son sein des milliers de personnes.
  Je lui dois aussi mon retour à la pratique religieuse et mon engagement actuel en Église par le biais de la communication. Il m’a encouragé à fonder Les Ateliers Prie-Aime voués à l’enseignement de la parole publique auprès des séminaristes, des lecteurs, des personnes appelées à témoigner de leur foi. Il m’a aussi encouragé à écrire et à publier des recueils de pensées et de prières dont il a fait la promotion. Maintes fois, il m’a invité à prendre la parole lors de ses prédications et de son ministère.

  Après une retraite éprouvante, à cause d’une crise d’asthme, il a tenu à rendre visite à un de mes frères, hospitalisé à Ottawa, entre la vie et la mort pour lui prodiguer le sacrement des malades. Bien que dans le coma, mon frère, aujourd’hui rétabli, se souvient, Dieu sait comment, de cette visite.
  Un lien profond d’amitié fraternelle, propice à la confidence, s’est alors tissé entre nous. L’homme (et le prêtre) a surmonté bien des épreuves, des ennuis de santé majeurs, des déceptions. Il a été la proie de médisances, d’humiliations, de calomnies, d’incompréhension. Dans l’épreuve, je peux témoigner que sa foi et son amour pour Dieu et son attachement à sa communauté trinitaire sont demeurés constants. Il a développé jusqu’à l’héroïcité le vœu d’obéissance.
  Alors que je lui demandais un jour quelle étais son aspiration ultime, il m’a répondu avec gravité : «Je veux être un saint!»


 

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